Histoire belge

// Octobre 2018 //

Dans la série « capitales européennes », virée de trois jours à Bruxelles. Au programme : frites, bières et Art Déco.

Et l’espoir d’apercevoir Roméo Elvis en jogging nylon.

Prologue

Salle d’embarquement pour le vol Toulouse – Bruxelles, 6h35. Un type assis à proximité fait des gestes étranges : il noue des fils imaginaires au-dessus de son crâne et fait des moulinets de bras.

Génial. Un dingo dans l’avion, c’est vraiment le genre de trucs qui me rassure.

Plus je bloque sur lui, plus il continue son air-noeuds, plus je descends mon flacon de Rescue de Bach sans aucun effet. Enfin quand même, c’est louche, non ?

Regard las de Jo : « T’es sûre que c’est lui le plus dingo dans l’avion ? »

Arrivée à Bruxelles à peine 1h20 plus tard, sans que le dingo de la rangée 11 n’ait finalement bougé.

Vingt minutes de train pour rejoindre le centre-ville, quelques minutes à pied et tadaaam : le studio de Maryam. Emplacement top, appart nickel, Maryam adorable : alerte bon plan !

C’est parti pour trois jours de rando urbaine.

La Grand place et ses environs (au coeur du centre historique, aka le Pentagone)

Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, elle est vraiment belle, encadrée de monuments grandioses aux styles très différents : l’Hôtel de ville (asymétrique) et la Maison du Roi sont résolument gothiques, tandis que les riches demeures et les maisons des corporations sont plus rectilignes et richement dorées.

Jo l’a préférée de nuit, je l’ai trouvée plus impressionnante de jour.

De là partent les galeries royales Saint Hubert : la galerie de la Reine, la galerie du Roi, la galerie des Princes. Très belles, elles ont été inaugurées en 1847. Leur style rappelle un peu celui de la galerie Umberto 1er à Naples. Elles abritent aujourd’hui des boutiques assez haut de gamme, un théâtre et un cinéma. Et les prestigieuses boutiques Marcolini (le chocolatier), Méert et Maison Dandoy (gaufres et autres douceurs).

Le terme lèche-vitrine n’a jamais été aussi adapté.

Un peu plus loin se trouve le fameux Manneken Pis : pas compliqué, suivez le flot de touristes et quand vous voyez une forêt de portables d’élever au-dessus de la foule, ben c’est là. Tout petit, à peine 55cm de hauteur, il est régulièrement habillé de différents costumes.

Ou tout nu, nature peinture.

Déjeuner au café De Monk, bistrot flamand typique. Le cadre est top mais la nourriture bof et la serveuse du jour aimable comme une porte de prison. Beaucoup plus intéressant a priori en mode bière / tapas.

Tu nous diras ?

Après avoir contourné la cathédrale Sts Michel et Gudule, nous avons remonté la (très longue) rue Royale jusqu’au Botanique dont j’avais super bien vendu à Jo sa belle et grande serre métallique qui allait donner de superbes photos.

Ahem.

Note pour plus tard : bien checker les horaires d’ouverture des parcs.

Quartier des quais

Retour par les boulevards sans grand intérêt à l’exception de l’immense Tour Finance au tout début, puis par le quartier des Quais.

Depuis le 16ème siècle, Bruxelles était parcourue de canaux utilisés pour le commerce et plus tard, l’industrie. Ils ont été remblayés dans les années 20 avec l’ouverture d’un nouveau port hors du Pentagone, et les anciens quais sont devenus une promenade verte aux noms évocateurs de ce passé : quai du Commerce, quai du Chantier, quai au Bois de Construction, quai à la Chaux, quai aux Foins, quai aux Pierres de Taille, quai aux Briques, quai au Bois à Brûler…

Une partie de la fin de la balade s’apparente un peu à un square de crackheads, mais globalement c’est plutôt sympa.

Promenade conclue par un petit verre en terrasse au Café Merlo à proximité de l’église Sainte Catherine.

Enorme coup de chance : notre première soirée coïncidait avec la Nuit Blanche.

Nous avons pu assister à deux performances autour de la danse (devine qui a choisi le programme) : D-Construction de la compagnie Dyptik, performance dansée autour d’une structure métallique et Le Cauchemar de Darwish de Benfury et James Thierrée (excusez du peu), performance autour du dabkeh.

Quartier des Marolles

Le dimanche matin, nous avions rendez-vous à 10h30 avec Xavier, greeter bruxellois. Tu ne sais pas ce qu’est un greeter ? Tsss.

Un greeter, c’est un bénévole qui fait découvrir sa ville aux touristes. Le principe est génial, et je ne dis pas ça parce que je suis greeter toulousaine, hein.

Après avoir traversé le quartier des Sablons, dévolu aux antiquaires chics, nous avons retrouvé Xavier sur l’esplanade de l’immense palais de justice qui surplombe les Marolles. L’idée était d’impressionner les justiciables qui y étaient convoqués et devaient gravir les rues pentues du quartier avant d’arriver à ses pieds.

Outre les dimensions impressionnantes du bâtiment et ses ornements pour le moins hétéroclites, c’est aussi le point de départ d’une plongée dans le quartier populaire des Marolles.

Ici se côtoient les brocantes et antiquaires moins hype que dans le quartier des Sablons, même si celui-ci s’étend progressivement. Ce n’est pas une gentrification mais une sablonnisation, dixit notre greeter ! Il nous a emmenés dans l’une des plus anciennes et authentiques brocantes du quartier : une quantité de pièces en enfilade, pleines à craquer de « brol » (Xavier nous a initiés aux expressions bruxelloises ; pour traduire « brol », tu ajoutes deux lettres et tu places les lettres dans un autre sens. Tu l’as ?).

C’est surtout dans ce quartier que l’on trouve le célèbre marché aux puces. Anecdote : c’est ici qu’Hergé s’est posté pour croquer les vignettes du Secret de la Licorne, dans lequel Tintin achète une maquette de bateau pour le capitaine Haddock au marché aux puces.

Aha ! Scotché, hein ?

On trouve aussi dans ce quartier quelques unes des nombreuses fresques murales géantes qui parsèment la ville, mettant à l’honneur les héros de la BD belge. C’est grâce à Xavier que nous avons remarqué que, dans la fresque dévolue à Odilon Verjus, la moitié du palais de justice placée sur le côté gauche du mur complète parfaitement le vrai bâtiment que l’on aperçoit en perspective plus haut.

À proximité immédiate du marché, l’ancienne caserne de la ville devenue le trendy Bistro Pinpon, mais également la première cité HLM de la ville, construite en 1911 dans le plus pur style art nouveau. Adorable cité, toujours habitée par d’anciens brocanteurs.

Dans ce quartier résidaient de nombreuses familles juives, déportées. Des pavés dorés gravés de leur nom et des conditions de déportation sont placés devant leurs maisons.

Pas très loin du marché aux puces, les anciens bains de Bruxelles. Remarquables, car ils abritent deux piscines… l’une au-dessus de l’autre. Depuis celle du dessus, la vue est paraît-il magnifique.

Un peu plus loin encore, l’Atelier des Tanneurs : l’ancien Palais du Vin accueille aujourd’hui un incubateur de startups, un marché bio et une galerie d’expo. La hype est en marche dans le quartier des Marolles.

St Gilles

Direction ensuite le quartier St Gilles, qui n’est pas un quartier à proprement parler mais l’une des communes qui composent Bruxelles, un peu comme les arrondissements parisiens ou marseillais. Populaire et cosmopolite, très méditerranéen, c’est principalement ici que se sont installées les vagues successives d’immigration : italiens, espagnols, portugais, grecs, turcs puis marocains.

Halte bien méritée pour un déjeuner au Café Maison du Peuple, installé au rez-de-chaussée de l’ancienne Maison du Peuple de St Gilles. Elle fut édifiée en 1906 pour remplir les fonctions de lieu de convivialité, de solidarité et d’accès à la culture du milieu ouvrier belge.

Il en existait quatre à Bruxelles, dont la principale fut inaugurée en présence de… Jean Jaurès, woop woop.

Pour rejoindre le haut de St Gilles où se trouvent de nombreuses demeures art nouveau, passage devant l’ancienne porte de Hal et devant la prison d’un style Windsor déconcertant.

Au gré des rues, il faut ouvrir l’oeil : entre deux maisons se niche parfois un passage conduisant à un espace vert insoupçonnable depuis la rue. Bruxelles n’a pas l’air d’une ville très verte : erreur ! Outre ces espaces verts préservés, la plupart des maisons disposent d’un jardin arrière donc invisible depuis la rue. Pour bien s’en rendre compte, il faut jeter un coup d’oeil sur Google Earth.

Retour sur les nombreux bâtiments art nouveau à découvrir entre St Gilles et Ixelles. Leurs caractéristiques principales :

  • les fameux sgraffites (technique de décoration murale qui consiste à superposer plusieurs couches de mortier coloré puis à gratter certains endroits pour révéler un motif, et à dorer certains parties),
  • l’utilisation du fer et du verre,
  • les motifs en « coup de fouet » des ferronneries,
  • l’utilisation de la lumière zénithale dans l’escalier central,
  • les détails travaillés des boîtes aux lettres, des numéros et des poignées de portes,
  • et enfin les décrottoirs à chaussures (regarde en bas des photos, juste à côté de la porte).

Parmi les nombreux que nous avons vus : la maison Horta (célèbre architecte de la période art nouveau, qui s’est ensuite dirigé vers l’art déco), l’hôtel Tassel, l’hôtel Solvay, l’hôtel Hannon, la maison Rosenbloom malheureusement très dégradée aujourd’hui.

Lorsque nous avons abordé ces problématiques, pleine de tact quant à notre différence d’âge, j’ai voulu essayer d’adapter mon vocabulaire pour parler à Xavier des initiatives « d’appel à souscription publique pour restaurer le patrimoine »… il m’a répondu qu’en effet, plusieurs campagnes de crowdfunding avaient été lancées.

Ok boomer.

Derniers instants partagés sur l’avenue Louise, autrefois quasiment l’équivalent des Champs Elysées parisiens ou des Ramblas barcelonaises. La bourgeoisie y occupait de riches demeures et paradait le long des allées aménagées reliant le bois de la Cambre au centre-ville.

Réaménagement brutal en amont de l’exposition universelle de 1958 : on y intègre alors une autoroute urbaine plongeant en tunnel sous les carrefours. Bim, adieu les allées vertes, bonjour béton et pollution. Tellement emblématique que ce genre de catastrophe est désormais qualifiée de « bruxellisation ».

Nos chemins se sont séparés à 16h après un greet passionnant et hors du commun : Xavier, coeur avec les mains ! Merci encore ! Si vous voulez découvrir Bruxelles avec un Greeter, n’hésitez pas (ce conseil fonctionne pour toutes les destinations, il y a des Greeters partout dans le monde).

Ixelles

Idem, il s’agit de l’une des communes de Bruxelles. Halte au Café Belga pour un chocolat chaud au son d’une playlist chill and relax (fake news, voir la playlist en fin d’article).

On entre plutôt ici dans la période art déco : après la place Flagey et sa Maison de la Radio, il faut longer les étangs d’Ixelles pour découvrir plusieurs immeubles et demeures le long de l’avenue Emile Duray, l’abbaye de la Cambre, le Palais de la Cambre, le Palais de la Folle chanson, et l’adorable petit square du Val de la Cambre (ambiance mini-ville de poupée… où les maisons coûtent tout de même la paille d’un million pour les plus modestes.)

Trajet en tram jusqu’au Palais Royal, puis descente à pied jusqu’à la gare Centrale (art déco elle-même) et le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles – BOZAR (art déco toujours), puis retour vers le Pentagone.

Un repas au chaud enfin aux Gens que j’aime, petit resto agréable mais pas dingo : carbonnade et boulettes de viande… avec des frites, évidemment.

En fond sonore, une playlist plutôt sympa… mais ponctuée de morceaux d’Aznavour. Hé oui, jusqu’ici.

Quartier de la Bourse

Dernier jour à Bruxelles !

Le matin, comme la veille, direction le Café Capitale pour un petit déj remarquablement consistant pour certains (suivez mon regard) (du cheesecake à 9h du mat’ ? sérieux ?)

Repère de hipsters freelance qui viennent squatter les fauteuils moelleux et le wifi, ou bien juste récupérer leur moccacino au quinoa équitable à emporter.

Puis balade dans le quartier trendy de la Bourse. Le Palais de la Bourse lui-même est magnifique, et à proximité se trouvent les Halles St Géry construites en 1881 et servant alors de marché couvert. Aujourd’hui, c’est un tiers-lieu : café, espace de coworking, galerie d’exposition, salle de réception voûtée au sous-sol, le lieu est topissime. En ce moment, il accueille à l’étage une expo très ludique et interactive destinée aux enfants sur la thématique de la ville. Bon, sûrement destinée aux enfants surdoués car à deux, on n’a pas réussi la moitié des activités.

Un endroit superbe et ultra chaleureux, si vous cherchez où vous poser pour coworker à Bruxelles.

Dans ce quartier assez arty se cache aussi la Maison de la Bellone : très belle et planquée au fond de la cour d’un espace pluri-artistique. Surprenante.

Déjeuner au Moeder Lambic où damn ! nos oreilles ont été accueillies comme à la maison : les toulousains de Sidilarsen en force dans le plat pays ! Le barman adorable a cherché à connaître nos goûts pour nous conseiller au mieux.

Pas évident pour mon cas : « Hem, euh, voilà, j’aime pas la bière. ». Ce qui ne l’a pas découragé et lui a permis de me conseiller tout de même pour que je goûte (spoiler : alors non hein, vraiment, je n’aime pas la bière). Jo, en revanche, était à Disneyland.

Atomium

L’après-midi, avant de repartir, direction l’Atomium. Accessible en 25 minutes depuis le centre-ville directement en métro avec la ligne 6, arrêt Heysel, pratique.
Xavier nous avait déconseillé la visite intérieure, nous en avons donc simplement fait le tour à l’extérieur. L’occasion idéale de goûter une gaufre liégeoise au soleil sous les globules (?) (oh, ça va, j’ai fait littéraire) de l’atome.

(ndlr : nappage chocolat superflu, risque avéré d’hyperhyperglycémie)

Visite enfin de son voisin immédiat l’ADAM – Musée du Design (comme à Londres, je n’y ai pas coupé).

Expo permanente assez importante sur le mobilier design, et deux expos temporaires : l’une sur l’exposition universelle de 1958 à Bruxelles, l’autre avec un focus sur 10 designers belges, leurs réalisations et leurs inspirations.

Voilà, ainsi s’achève un week-end à l’étranger… sans avoir l’impression d’être à l’étranger, c’est une drôle d’impression. Avec une moyenne de 18km par jour (oui oui oui messieurs dames, on a dit « rando urbaine » ou bien ?), l’addition calorique est passée nickel.

Faut dire que… Patate-houblon-patate-houblon : la Belgique, c’est pas le pays idéal pour démarrer un régime gluten-free.

Le sens de la déco

Chaque habitation est pourvue d’un petit extincteur, qui se décline de toutes les couleurs pour une intégration optimale dans ton salon. Classe.

Classement des bières :

  1. Brasserie De ranke – Guldenberg (Moeder Lambic)
  2. Brasserie de la Senne – Jambe de Bois (Café Maison du Peuple et Café de Monk)
  3. Brasserie No Science – Nom de Zeus (Moeder Lambic)
  4. Brasserie de la Senne – Brusseleir blonde (café De Monk)
  5. Brasserie Belgoo – Luppoo
  6. Brasserie de la Senne – Brusseleir brune (Café Merlo)

La playlist du voyage (ouais, on inaugure une nouvelle rubrique)

Tiroza – Buraka som sistema au Café Belga (la musique chill du dimanche aprèm, volume 12000 db dans tes oreilles)

Emmenez-moi – Aznavour et Che sera – Wax Tailor aux Gens que j’aime

Comme on vibre – Sidilarsen et Back to basics – Sidilarsen au Moeder Lambic

3 Comments

  1. […] viennoiseries : J, qui ne recule pas devant un cheesecake au petit déj, a craqué sur les borůvkový koláč ou makový (sorte de brioches aux myrtilles) et les […]

  2. […] On te laisse imaginer la taille (et le nombre) des assiettes de petit déj de Jo, que tu sais ne pas être impressionné par une monstrueuse part de cheesecake dès potron minet – cf le Café Capitale à Bruxelles. […]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.